186 – Chronique littéraire tripale: « LES DRAGONS », Jérôme COLIN (roman – Allary Editions – août 2023)

Le mardi 26 septembre 2023 à 15.00 heures, Romain Fabri (librairie « L’Ours à Lunettes« , Grand-Place à Huy) recevait au Centre Culturel de Huy le plus connu des chauffeurs de Taxis belges en la personne de Jérôme COLIN (« Hep Taxi« , RTBF).

Jérôme Colin présentait son nouveau roman « LES DRAGONS » (Allary Editions, août 2023) devant un pare-terre d’une centaine d’étudiants du réseau secondaire hutois ainsi que de citoyens locaux dont je fis partie.

Pour l’occasion, je m’installai dans un des confortables strapontins rouges, au premier rang de la grande salle, non sans avoir acquis à l’entrée le fameux roman au centre de l’attention. Trois fauteuils « club » installés sur le devant de la scène et séparés par deux tablettes auguraient de l’arrivée imminente de l’auteur et des deux instigateurs de ce qui deviendrait pour moi un évènement.

Je me plongeai sans attendre dans les trente premières pages de l’ouvrage afin d’en ressentir le ton et l’atmosphère. Jérôme, Romain et une jeune femme s’installèrent avec une grande ponctualité face au public discipliné, me contraignant à refermer très temporairement le bouquin que j’eus du mal à lâcher…

C’est con, mais en voyant de-visu Jérôme (oui, je m’octroie la liberté de l’appeler par son prénom), l’homme du « Taxi » de la boîte à images de mon salon, celui-ci prend corps et vie physiquement ce qui transcende son image… « Ben oui, c’est le même homme! » – me dira-t-il lors de la dédicace qu’il acceptera de me signer à l’issue de la séance… (merci)

Ignorant tout du sujet traité avant d’en avoir parcouru trois dizaines de pages quelques minutes plus tôt, je fus happé par le discours de l’auteur répondant aux questions de Romain.

« LES DRAGONS » sont « ces enfants détruits par leur famille, l’école ou l’époque » (cf 4ème de couverture).

Jérôme COLIN explique avoir vécu une immersion de jour en centre de soins psychiatriques, au plus proche des adolescents y séjournant temporairement ainsi que des médecins et soignants dévoués à leur accompagnement.

En sa qualité de journaliste, il a recueilli leurs témoignages et partagé certaines tranches de leur quotidien, recevant quelques fois leurs confidences, avec beaucoup de patience, d’humilité et de tact, qualités qu’on lui connaît lorsqu’il reçoit ses invités dans son Taxi médiatique (Hep Taxi – RTBF).

Très conscient et interpellé par la condition d’être de ces ados écorchés, blessés, meurtris, Jérôme répond également aux questions du public avec sincérité. Il dira que, de son humble avis personnel, un cadre de vie rassurant humainement, et l’amour inconditionnel sont certainement les premiers atouts que l’on peut offrir à ces êtres en détresse.

« L’important, c’est d’avoir quelqu’un à qui parler… »

Cette simple phrase prononcée sur scène à plusieurs reprises et signée de sa main sur le second feuillet de mon exemplaire revêt une intensité sacrale, de sa bouche et de ses yeux…

Ce n’est qu’au bout d’une quarantaine de minutes que quelques jeunes étudiants trouvent l’aplomb d’exprimer leur question respective, recevant une réponse respectueuse et empathique…

L’empathie, un autre mot-clé exprimé par Jérôme Colin, insistant sur la nécessite de pouvoir exprimer lorsqu’on est triste, lorsqu’on se sent mal, et d’oser ne pas se prostrer dans sa chambre d’ado, comportement qui n’est pas une rébellion. Il encourage les jeunes à sortir et se « frotter aux autres » pour oser la vie…

Ne restez pas seuls, insistera-t-il…

Evasif quant choix du prénom de son personnage principal, « Jérôme« , il répondra que si le lecteur souhaite imaginer qu’il s’agit de lui même, il en a le droit, mais ne le revendique pas…

Ma conviction personnelle sera forgée dès le lendemain, à l’issue de la lecture intégrale du roman qui m’a profondément touché. Un récit qui prend aux tripes, qui dérange et pose les « choses » telles qu’elles sont, sans tabou, sous le couvert d’une fiction romanesque.

Articulé autour d’un Amour coup de foudre, l’histoire invite le lecteur à pénétrer au coeur d’un groupe d’adolescents « abîmés », parfois « détruits », et exhale une forme d’impuissance déconcertante jusque dans le coeur des « encadrants ».

Là où se mêlent dégoût et tendresse, Jérôme Colin soulève un fait de société majeur en nous l’exposant sans ménagement mais avec la maîtrise de mots percutants et touchants, le mal être d’une certaine génération d’adolescents en déroute…


En quittant la salle, je n’ai de cesse de prendre place dans la file au comptoir d’accueil où Jérôme me dédicacera mon exemplaire de ce qui devient pour moi un bijou littéraire et une nouvelle ouverture de conscience (encore une…).

Merci Monsieur COLIN, merci Jérôme,

Merci Romain Fabri (« L’Ours à Lunettes« ) et le Centre Culturel de Huy pour l’organisation de cette belle rencontre…

Vincent Poitier, alias « le pensiologue »

27 septembre 2023.

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